nouvelles érotiques

Lundi 10 août 1 10 /08 /Août 20:52
- par Caroline pour Paul


Minuit venait de carillonner. Le téléphone fit écho.
Caroline décrocha le combiné à la deuxième sonnerie.
La voix dans l'écouteur était mâle et juvénile, le débit précipité:
--Je suis rasé entièrement et j'aime tout! lança le garçon à toute vitesse.
Encore un jeune homme gay qui s'était trompé de réseau téléphonique. Elle
s'apprêtait à le remettre sur les bons rails avec gentillesse, quand le déclic
l'arrêta: il avait déjà raccroché.

Décidément, quel drôle de métier! Caroline avait accepté au pied levé de
remplacer sa meilleure amie, Sofia, pour une semaine. C'était sa quatrième nuit
à son poste et elle ne s'y faisait toujours pas. Il fallait avouer que Sofia
avait quand même décroché un drôle de job ce coup-ci. Hôtesse pour téléphone
rose dans un grand call-center de la banlieue d'Orléans, rien que ça! En
d'autres circonstances Caroline n'aurait jamais accepté un travail aussi
saugrenu et aussi éloigné de ses activités... Mais Sofia était sa meilleure
amie, et quand elle l'avait appelée, affolée, depuis l'hôpital, en la suppliant
de la dépanner pour lui éviter de perdre sa place, elle n'avait pas pu lui dire
non. Justement, elle avait un break de quelques jours entre deux missions
d'interprétariat, aussi avait-elle accepté de venir loger dans le petit studio
de son amie et de tenir son rôle chaque soir au centre de téléphonie jusqu'à son
retour de congé maladie.
En quatre jours, elle en avait entendu de toutes les couleurs, de la promesse de
viols multiples aux offres de soumission masochiste, en passant par des
injures obscènes et toute une gamme de perversions scatologiques dont elle ne
connaissait même pas l'existence auparavant... Qui aurait cru qu'Orléans
dissimulait tant de vies cachées, tant de phantasmes, tant de pulsions plus ou
moins refoulées?
Quand elle regagnait son logement, tard dans la soirée, elle ne
pouvait s'empêcher de regarder souvent par-dessus son épaule...
Et si ce type louche à la voix rocailleuse, celui qui lui avait dit qu'il adorerait
l'étrangler tout en la chevauchant, rôdait alentour?
La plupart de ses correspondants nocturnes avaient toutefois des voix peu assurées,
le plus souvent de très jeunes gens maladroits ou des célibataires solitaires en
mal de sensations fortes.
Parfois un homme marié qui demandait à ce qu'elle se joigne à lui et sa femme.
Caroline déclinait avec politesse, il ne fallait pas rencontrer les clients,
ce n'était pas permis par le règlement.

Bien sûr, en réalité, certaines de ses collègues le faisaient, parfois contre
rémunération pour arrondir leurs fins de mois difficiles, parfois, à sa grande surprise,
"pour le fun" comme le lui avait confié sa collègue Samira, une jolie rousse qui
n'avait pas froid aux yeux.
--Mais comment peux-tu te risquer à rencontrer quelqu'un que tu ne connais que
par téléphone?! s'était insurgée Caroline. Enfin, Samira, tu pourrais tomber sur
n'importe qui, un taré échappé de l'asile psychiatrique, un serial-killer, un
type glauque criblé de maladies ou un traquenard pour te faucher ta
Carte Bleue et Dieu sait quoi encore!
--Pour ce qu'il y a dessus, ma pauvre Carte Bleue, je leur souhaite bon courage,
avait répliqué Samira, rieuse; tu sais, après quelques mois de ce taf, tu apprends
assez vite à reconnaître les types qui ne sont pas francs du collier, en dix
minutes de conversation, tu es fixée! Moi je préfère aller à des rendez-vous
avec des couples, c'est plus amusant, et si l'un des deux est moche, je me
concentre sur l'autre. Comme ça j'ai une chance sur deux de passer une bonne
soirée. Tu devrais essayer...

Caroline avait levé les yeux au ciel, effarée, en se disant qu'il y avait une
providence pour les inconscientes. Ce n'était pas elle qui se laisserait
embarquer dans une histoire pareille... Bon, elle avait bien été tentée, un
court instant, de faire venir l'un de ces soumis volontaires qui lui faisait des
offres de travaux ménagers, pour nettoyer la salle de bains et le cellier de
l'appart de Sofia, lesquels étaient dans un état de pagaille affligeant, mais
juste un instant, vraiment, et elle s'était retenue.

Minuit et demie. La nuit se traînait.
C'est alors que le téléphone sonna à nouveau...

La voix mâle était grave et chaude, un peu âpre, avec une diction imparable, une
de ces voix vibrantes et maîtrisées qui vous donnent le frisson.
Un peu troublée malgré elle, hésitante, Caroline commença à ébaucher un
scénario, une scène de séduction au bord d'une piscine... L'inconnu à la belle
voix la coupa net. Il voulait tout autre chose. Un "plan réel", comme il disait.
Une rencontre. Une soumission à ses désirs...

Caroline s'empourpra et se surprit à bafouiller lamentablement avant de réussir
à émettre une réponse toute faite sur le règlement qui n'autorisait pas...

--Rien à foutre, dit l'inconnu, tu viens et c'est tout. Tu fais ce que je te
dis. Tu ne le regretteras pas.

Est-ce qu'il voulait dire qu'il comptait la payer pour ses services? Outrée,
elle se redressa et entreprit d'invectiver son correspondant, comme quoi les
filles du call-center n'étaient pas des putes, d'abord, juste des femmes qui
cherchaient à gagner leur vie dans un monde de tarés dans son genre, à lui, et les
espèces de pervers tordus dépravés qui se proposaient de les payer pour un soir
au risque de leur faire perdre leur travail de manière définitive étaient de tristes
individus malfaisants et néfastes!
Arrivée au bout de sa tirade, elle tendit l'oreille. Plus un bruit... Il avait sans doute raccroché...
Une si belle voix, quand même... Quel dommage...
Il y eut un petit rire.
--Qui te parle d'argent? fit l'inconnu à la voix grave. Moi je te parle de
plaisir... Tu vas jouir comme jamais de ta vie. Prends un papier et note. Tu vas
suivre mes instructions.

Déstabilisée, elle obéit machinalement. Une feuille de papier, un stylo, elle
écrivit sous la dictée...
Une heure plus tard, elle était dans la navette qui la ramenait des Aubrais vers
Orléans. Elle retira une manche de son manteau et se contorsionna pour se
débarrasser de son haut décolleté gris pâle à manches longues. Coup de chance, il
était en lycra très extensible. Une bretelle rose de soutien-gorge pigeonnant
apparut, sur une épaule blanche, vite enfouie à nouveau sous son manteau.
Deux sièges plus en avant et sur sa droite, un groupe de quatre garçons devisait sans
lui prêter attention. L'un d'eux, du coin de l'oeil, s'aperçut vaguement de son
manège. Elle était en train de répéter la manoeuvre pour l'autre bras. A
nouveau, elle dut se tortiller pour se débarrasser de son vêtement. Le garçon
alertait ses potes, elle accéléra le mouvement. Les trois autres comparses se
retournèrent à l'injonction de leur ami..
Ouf! elle était décente.
Juste à temps... Elle descendit la première du wagon et pressa le pas, de crainte qu'ils
ne la suivent. Quatre types dans les rues presque désertes, et elle, si
peu vêtue...
--Je suis folle, se dit-elle. S'il n'y avait pas eu ce type avec cette voix
incroyable... Je ferais mieux de rentrer...
Mais la voix troublante résonnait encore dans sa tête. Comme si l'inconnu la téléguidait.
Il fallait à présent se débarrasser de son pantalon et de son bustier. Pour le
bustier, c'était assez simple. Elle l'attrapa à travers l'épaisseur du manteau, pinça
le tissu et le fit glisser vers le bas d'un coup sec, jusqu'à la taille. Il lui
faisait à présent une sorte de ceinture improvisée.
Pour le pantalon... Ma foi, il n'y avait pas trente-six solutions. Elle s'arrêta
près d'un banc public en plein milieu de la rue, posa son sac, saisit la
ceinture élastique, se déchaussa d'une torsion de talon et descendit d'un geste
rapide le pantalon jusqu'à ses chevilles. Il était tard... un groupe de gens
approchait. Si elle faisait assez vite, peut-être qu'ils ne remarqueraient rien.
D'une main preste elle dégagea ses chevilles et se rechaussa tout en roulant
vivement les jambes de son pantalon avant de faire disparaître celui-ci dans le
sac.
Sauvée.
Encore que... Le bustier, délogé de sa taille par toutes ces contorsions, commença à
glisser le long de ses hanches. A chaque pas, il descendait davantage, cela
allait bientôt se voir sous son manteau court... Comment s'en défaire? Sous un porche?
Cela risquait d'attirer l'attention... Heureusement, le but approchait.
L¹arrêt du tramway était en vue.
Elle crocha le bustier à travers sa poche et s'y cramponna d'une main jusqu'à l'abri
du tram. Là, elle s'assit sagement comme si elle attendait le dernier passage, et fit coulisser le bustier jusqu'à ses pieds. Une seconde après, il était rangé dans son sac et elle avait retrouvé une apparence de jeune fille de bonne famille, à condition de ne pas regarder de trop près la jarretelle noire brodée que la fente de son manteau révélait à mi-cuisse.

Elle attendit en frissonnant... Elle n'aurait jamais cru qu'il puisse faire si
froid au mois d'août.
Il est vrai qu'elle ne portait plus qu'un string, un soutien-gorge échancré et
un porte-jarretelles de dentelles sous son léger manteau d'été...

La voiture sombre apparut comme un fantôme, son moteur presque
silencieux. La porte arrière s'ouvrit. Caroline se leva, s'avança d'un pas
hésitant... Une main gantée se tendit par la portière, l'aidant à monter. Il
faisait noir à bord, le plafonnier ne devait pas fonctionner. Exprès? Elle
cligna des paupières pour s'accoutumer à l'obscurité, mais déjà on lui bandait
les yeux, avec une sorte de loup noir fixé serré autour de sa tête par deux
brides. Elle apercevait de petits éclats de lumières de la rue par le haut du
bandeau, mais elle ne pouvait rien voir autour d'elle.
La voiture redémarra en douceur avec un ronronnement feutré.
Une main d'homme lui palpa les seins avec rudesse à travers l'étoffe du manteau, une
autre se glissa entre ses jambes pour vérifier sa semi-nudité et remonta jusqu'à
l'entrecuisse. Elle tendit les bras à l'aveuglette pour contrecarrer ce geste
brutal. On lui attrapa les poignets, on les réunit dans son dos. Il y eut le
contact du métal froid puis le cliquetis des menottes, que l'on serre et que l'on
referme l'une après l'autre. Quelqu'un la repoussa en arrière pour qu'elle se retrouve
le dos en appui sur la banquette arrière, la poitrine cambrée à l'extrême par la
posture que lui imposaient ses bras attachés.
On la pelota sans ménagement, un homme sépara ses genoux de force, on lui enfonça un
doigt ganté.
Elle cria. La voiture accéléra.

Au début, elle essaya de compter les tours et les détours pour tenter de se
situer. Cependant, elle connaissait trop mal la ville et dut bientôt renoncer.
Elle essaya de savoir combien étaient ceux qui l'emmenaient.
Il y avait à bord de la voiture, outre le chauffeur, l'homme qui se tenait assis
à côté d'elle et la palpait comme du bétail, mais il lui semblait bien aussi
avoir senti une présence sur le siège avant, à la place du mort. Un complice? Ou
l'initiateur de toute l'opération?

La voiture roulait très vite à présent. Beaucoup de virages. Ils
devaient être sortis de la ville, à moins qu'ils ne tournent délibérément en
rond pour la désorienter.

Soudain, un ralentissement la plaqua contre l'homme qui la touchait. Il sentait
le tabac et un parfum ambré. La voiture pila, comme devant un portail
ou un passage réservé. Les pneus firent crisser du gravier, on roula encore
quelques mètres puis le moteur s'arrêta. Bruits de portières, des pas sur les
gravillons. Combien de bruits de pas? Deux, trois? Elle n'était pas sûre... Un bras
d'homme l'entoura, l'aida à descendre.
--Avance ! fit une voix rauque.
Elle tenta de faire deux pas, au hasard, sans voir où elle allait.
--Pas comme ça, fit la même voix, à quatre pattes!
Il était très difficile de se mettre à genoux avec des talons hauts sans
s'écrouler n'importe comment. Elle y parvint pourtant, non sans se râper les
jambes. Elle ne pouvait pas s'aider de ses mains, toujours attachées dans son
dos. Elle rampa sur les genoux, le buste penché en avant, en suivant la voix
et le bruit des pas de celui qui donnait les ordres. Ils montèrent quelques
marches, sans doute vers une terrasse; des dalles avaient remplacé les
gravillons sur le parcours.

Un tintement de clefs, une porte massive, une entrée où les pas résonnaient, un
sol froid sous ses jambes - sans doute du parquet ciré, ses bas résille
s'accrochaient à chaque mouvement vers l'avant. Caroline avait l'impression de
sentir des regards braqués sur elle. Elle accentua la cambrure de son dos, le
balancement de ses hanches, à tout hasard. L'homme à la voix troublante était-il
seulement présent ? Elle n'avait pas reconnu ses inflexions chaudes dans la voix
du donneur d'ordres.

On la conduisit dans une pièce sans lumière.

On la laissa là, comme une prieuse vouée aux ténèbres.
Elle commençait à avoir très mal aux genoux mais, bien que personne ne lui ait
donné de consigne, elle n'osait pas changer de position.

Des pas lourds se rapprochaient, la porte claqua.
Un homme était entré. Un froissement de tissu, un petit bruit de fermeture
Eclair... L'homme passa la main dans les longs cheveux de Caroline, agrippa sa nuque
et la guida jusqu'à lui. Il passa un doigt sur ses lèvres pour l'inciter à les
entr'ouvrir. Etait-ce "Lui", ou un complice opportuniste? Elle ne savait pas.
Elle céda. Il s'enfonça dans sa bouche jusqu'à la garde et dirigea le
va-et-vient de sa tête, longuement. Il se retira sans avoir joui.
Sans un mot, il tira sur la chaîne reliant ses menottes pour la faire lever. Elle
obéit. Elle avait perdu l'une de ses chaussures et se débarrassa de l'autre d'un
léger coup de pied. Il la conduisit jusqu'au mur du fond, le plus éloigné de la
porte, d'après la façon dont résonnaient les pas. C'était sans doute un ancien
fumoir, toute la pièce était imprégnée d'une odeur tenace de cigare. Il y eut un
bruit métallique.
L'homme manipulait un anneau de fer scellé dans le mur; il y
relia les menottes. Il vérifia qu'elles étaient bien fixées et tira sur la chaîne.
Caroline bascula en arrière, le haut du dos en appui contre
le mur glacé, jambes écartées pour ne pas perdre l'équilibre. Il en profita
aussitôt pour passer une main le long de sa cuisse, à l'intérieur, en remontant.
Il enfonça le pouce dans sa fente, elle n'était pas prête, il força un peu. Il
avait les ongles longs, il la griffait, c'était douloureux. Elle se contraignit à
rester muette, mais des larmes lui échappèrent.
Il remplaça rapidement son pouce par son sexe. Cette fois, il ne tarda pas à lui
arracher un gémissement, qui se mua en cri aigu quand il la saisit aux hanches
pour mieux la besogner. Elle sentit une vague de chaleur monter en elle, comme
une fièvre qui l'emportait, de plus en plus haut... Il se retira soudain, la fit
se redresser, la retourna et la contraignit à se pencher en avant, en appui joue
contre le mur humide. Il guida son sexe entre ses fesses cambrées et la pénétra d'un
seul coup, la faisant hurler. Il déchargea après quelques coups de boutoir, se
retira en lui arrachant un autre cri...
Ses pas s'éloignèrent, la porte se referma.
Caroline resta seule dans l'obscurité. Elle se laissa glisser le long du mur,
les jambes tremblantes. Au-dehors, un moteur de voiture, des talons qui claquaient, des voix, un rire...

La nuit venait tout juste de commencer...
 
                                                                       *****
Par paulgris - Publié dans : nouvelles érotiques - Communauté : textes érotiques
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Dimanche 9 août 7 09 /08 /Août 10:48
Pour Paul - par Caroline




Froid…  Ce lit est dur et froid, il faut que je me lève... Je reprends conscience,
avec difficulté.

Je suis étendue sur une surface si inconfortable que j’ai somnolé sans repos, et ça
m'évoque  un  souvenir lointain,  lié  à  l'enfance.  Aux  randonnées,  au  camping
sauvage.
Quand j’ouvre les yeux, je  comprends pourquoi :  je suis étendue à même le
sable, sur une plage. Les vagues venaient lécher la plante de mon pied droit, et
l'eau est glacée, malgré le soleil déjà haut. Voilà ce qui m’a réveillée…
Le vent me fait frissonner.
Combien d'heures ai-je pu passer ainsi, échouée sur le rivage ?

Avec effort, je me redresse, puis je me mets debout : j'ai mal partout mais,
selon toutes apparences, rien de  cassé. Mes vêtements humides me collent à la
peau. Inspectons les dégâts...
Je porte un bikini rose pâle rendu presque transparent au contact de l'eau, et un
paréo multicolore noué autour des hanches, révélant sur toute sa longueur ma
jambe droite jusqu'à mi-cuisse; la même tenue que lors de la soirée, hier, à bord
du bateau...

Le bateau... La croisière. Nous étions toutes trois dans la même cabine... Je me
revois en train d'étudier mon reflet dans le miroir de ma cabine, intimidée, avant
de me risquer à sortir si légèrement vêtue, avec mes deux camarades de voyage.

Après, plus rien. Le néant...

Sur ma cheville, je découvre une estafilade. Mes jambes et ma joue gauche
sont poisseuses de sable. Je me contrains à m'avancer dans les premières vagues
trop  fraîches,  paréo  relevé  jusqu'à la  taille,  et  je   m'asperge   d'eau  pour  m'en
débarrasser...

Le bateau...

Je me souviens avoir pris une douche à bord du bateau. Sans doute hier soir,
avant d'aller dîner et participer à cette soirée dansante. On approchait des
côtes de l'état de Sabah.

Que s'est-il passé ? Un  naufrage ? Une avarie ? Un acte de piraterie ?
Impossible de me souvenir au-delà, mon esprit fiévreux ne retrouve que des
ténèbres. Et mes amies ? Et l'équipage, les autres passagers ? Pourquoi n'y a-t-il
aucune trace d'eux ?

Je me frictionne avec énergie pour chasser l'angoisse sourde qui monte en moi,
une   impression  de   menace...  Comme  si  on   m'observait.  C'est   idiot,  il  n'y  a
personne   en   vue,   et   pas  même  une   ligne  téléphonique  à   l'horizon  sur   des
kilomètres...
Une fois briquée comme un sou neuf, je regagne la rive en grelottant.
Sans hésiter j'escalade le talus, droit devant moi, et je me dirige vers
l'intérieur des terres.

La végétation a été dégagée sur un étroit passage, puis a commencé à repousser.
Un sentier ? Il ne doit pas être très fréquenté...
Rien de mieux en vue - je me décide à le suivre, espérant qu'il mène à un
village, une route, un endroit habité où l'on puisse me venir en aide...
Il ne me faut parcourir que dix pas au-delà de la plage pour comprendre que ma
progression va être plus difficile que prévu. Mes pieds nus sont blessés,
piqués, écorchés à chaque pas. Un fragment de bois qui casse sous mon talon
droit me crible d'échardes. J'avance en boitillant.
Et le soleil s'en mêle, qui sèche mon bikini en quelques minutes et commence à
me cuire le dos... Il va faire chaud. Très chaud...

Trouver de l'eau, de l'ombre, un abri ! Marchons...

J'ai l'impression de braver la jungle depuis des heures; en réalité, je dois à
peine avoir  parcouru  deux  ou  trois  kilomètres sur ce terrain  accidenté, mais
chaque mètre supplémentaire infligé à mon pied à vif m'arrache des grimaces de
souffrance.

La construction qui apparaît au détour du chemin est une totale surprise.

Pas de bungalow de club de vacances, ni construction fonctionnelle comme une
cabane de garde-chasse ou garde-pêche, ni quelque avant-poste administratif.
Mais une étroite longhouse sur pilotis, selon toutes apparences flambant neuve et
pourtant  en totale en  affinité  avec les  coutumes  anciennes de cette partie  du
monde.

Une longhouse est en général occupée par tout un village. Celle-ci ne semble pas
assez grande, plutôt destinée à une famille. Des pêcheurs, sans doute...

A pas prudents, je monte les marches, dérangeant un lézard qui prenait le
soleil.
Je m'avance sous la véranda qui longe tout le bâtiment, et je toque à ce qui me
semble être la porte. Un panneau coulisse sans un bruit, sous l'impulsion de mon
poing.

La pièce est vaste, ombrée, apparemment déserte.
Une natte en rafia est étendue sur le sol, couvrant une large portion du
plancher. Une moustiquaire pendue au plafond se déploie au-dessus.
Contre le mur opposé est appuyé en plan incliné un grand miroir piqueté,
vaguement encadré de motifs à la Mucha, qui doit sans doute avoir été récupéré
dans un de ces vieux hôtels britanniques de la période coloniale.
L'endroit a l'air propre et sain, dépourvu de tout relent de renfermé ou de
moisissure. Il me semble percevoir une légère odeur de fumée, mais ça ne dure
qu'un instant. De l'encens, peut-être...
Je soulève un bord de la natte entre deux doigts, je la secoue et la replace à
terre: pas de bestiole rampante ou piquante dissimulée.
D'un seul coup, je me sens si lasse ! C'est sans doute cet encens exotique qui me
tourne la tête.
Je dénoue le paréo roulé autour de mes hanches, je le replie pour m'en faire un
coussin de  fortune,  et  je  m'allonge.  Si  l'on  vient, je  m'expliquerai, je pourrai
demander à être conduite jusqu'à la ville la plus proche. Je  voudrais juste me
reposer un moment. Dormir...
Malgré la dureté du plancher, je bascule dans le sommeil en quelques secondes.

Je rêve...

Un  drôle  de  rêve, étrange  et agréable  - je  sens une  chaleur inconnue qui se
répand   en   moi,   une   délicieuse  chaleur,   comme   une   flamme   qui   viendrait
effleurer mes jambes, s'enrouler le long de mes cuisses... Est-ce la moustiquaire
déployée qui caresse ainsi mon dos ?
Reprenant lentement contact avec le réel, je m'étire comme un chat, roulant d'un
flanc sur l'autre...

--J'ai cru que tu ne te réveillerais jamais, ma douce, dit une belle voix grave
toute proche.

Ouvrant les yeux d'un seul coup, je surprends un homme qui se tient au-dessus
de moi.

Un inconnu, et pourtant qui a quelque chose de curieusement familier.
Il a des yeux d'un bleu-gris à l'éclat impérieux, des yeux couleur Steve
McQueen, pensé-je confusément, et des pupilles immenses.
Il sourit, d'un incroyable sourire, mi-charmeur, mi-moqueur. Il est agenouillé
sur la natte à côté de moi.
Torse nu, il porte un jean blanc et des chaussures
souples comme j’en ai déjà vu aux pieds des danseurs. Sa peau de blond naturel,
à part quelques taches de rousseur, est presque aussi pâle que la mienne, ses bras
ont  un   léger   duvet   cendré   qui  doit   être   doux   au   toucher... 
Il a un visage magnifique et une présence qui éclipse jusqu'à l'étrangeté de la situation.
Sa main caresse mes cheveux d'un geste très naturel, comme s'il en avait
l'habitude.
Pendant un moment je me demande ce qui me donne aussi chaud, à croire que
quelqu'un  a laissé allumé un fer à souder... Mais c'est juste son regard. Il me
scrute avec une familiarité si insistante...
Pourtant, ça se voit qu'il n'est pas d'ici... et il ne me connaît pas...

Quel genre de type se comporte ainsi en pays lointain, avec une inconnue?
Un fou, me dis-je, tous mes instincts de survie soudain alertés.
Cet étrange lueur dans ses yeux, que je n'arrive pas à décrypter...
C'est forcément un malade, et peut-être dangereux.
Il y a un fou dans la maison.
Fuir...
Mue par la  peur, je veux m'asseoir, quand je m'aperçois que les légers triangles
qui composaient le haut de mon maillot se sont écartés durant mon sommeil,
révélant ma poitrine.
Sous le choc, je laisse échapper un  petit cri, croisant les bras pour couvrir ma
nudité involontaire. Je comprends à présent son drôle de regard...
L'homme penché a un petit rire.
--Ah non, dit-il, tu ne vas pas te cacher ? J'ai déjà eu le temps d'admirer...
Il prend mon poignet, l'écarte avec fermeté, révélant la région du coeur.
--Tu avais pourtant l'air d'apprécier, tout à l'heure, poursuit-il; je t'ai même
entendue ronronner...

D'une main désinvolte, il effleure mon sein nu, dont la pointe se dresse
aussitôt, comme pour confirmer ses dires et en réclamer davantage...
Il m'a touchée pendant mon sommeil...
Je sens que je m'empourpre, embarrassée, et maudissant les réactions de mon
corps. J'aurais cru être anesthésiée, après une si longue période d'abstinence.
Comment le simple contact de la paume d'un inconnu peut-il déclencher une
telle vague de sensations fortes ?

La chaleur délicieuse éprouvée en rêve m'envahit à nouveau, me trouble.
Il peut déchiffrer sur ma physionomie tout ce que j’éprouve; il rit :
--Tu vois bien.

Je cherche à dégager mon bras de sa poigne.
Ce n'est pas tant la nudité qui me gêne, que sa façon de me dévisager comme s'il
lisait en moi tout ce qu'il y a de plus inavouable.

Il resserre sa prise, sans brutalité, mais très sûr de lui.
--Tu ne veux pas déjà me quitter, affirme-t-il.
Venant de lui, ça résonne comme un reproche.
Il écarte mon autre bras. Avant que je n’aie eu le temps de comprendre ce qu'il
s'apprête à faire, il plonge en avant et sa bouche  se referme sur l'aréole du sein
droit qu’il vient d’exposer.
Je laisse échapper une plainte malgré moi...
En réponse, sa caresse du bout des lèvres se transforme en morsure. Une longue,
profonde morsure qui me paralyse et m'arrache un cri aigu.
L'inconnu se redresse, renverse la tête en arrière...
Sa voix sonne comme une gifle.
Il rit !

Son regard croise le mien, il explique, comme une évidence :
--J'ai hâte de t'entendre crier sous moi. Et pour une bonne raison, cette
fois...
Je détourne la tête, troublée. Je voudrais disparaître sous terre.
Et en même temps je ne peux m'empêcher de le regarder à la dérobée.
Il a une voix chaude, bouleversante.
Une de ces voix qui font succomber les filles…
Quelque chose dans son inflexion me dit qu’il a dû en avoir plein, dans sa vie, et
je l'imagine aisément se pencher sur tant d’autres femmes, inconnues sans visage,
durant bien des nuits blanches.
De  ces  nuits  sans  fin  comme il en  a  traversé  sans  doute  par centaines,  qui
patinent les cordes vocales à force d’alcool et de tabac, qui laissent des cernes et
des griffures à même la peau, et il s’en fout sûrement…
Depuis   combien   de   temps, combien d’années n’ai-je plus laissé personne
s’approcher de moi ? Même hier, à bord du bateau, alors que j’avais accepté le
principe de cette croisière  pour essayer de profiter de mes vacances, tandis que
les couples se formaient alentour, je suis restée sur la défensive tout le temps,
incapable de permettre à un homme d’engager la conversation.
Le nombre de fois où je me suis promis que jamais plus je ne laisserai un garçon
entrer dans ma vie ! Trop d’ennuis... Vraiment.
Le désir, la dépendance ? Il y a encore douze heures, j'aurais ri, fièrement : je ne
connais pas ça !
Pourtant, cet homme que je n'ai jamais vu  auparavant me touche, et je ne fuis
pas.
Sa  prise autour  de mon poignet   est   ferme,   et   cependant   sans   brutalité   ni
contrainte. C'est comme s'il me réduisait à sa merci juste par le regard.
Ses yeux sont envahis d'ombre, les pupilles noires immenses dévorent l'iris bleu,

forment des lacs obscurs, on s'y noierait avec bonheur.
Son  visage  est  d'une  beauté  à tomber. Mobile,  mutable, changeant  à chaque
instant.
Mais je n'ai presque pas le temps de le détailler tant ses yeux me fascinent...
Il m'attire à lui, et j'accompagne son geste presque  malgré moi, comme  si mon
acceptation était prévue de toute éternité et ne souffrait aucune discussion.
Sa bouche se promène  sur mes seins, prenant tout son  temps, se presse contre
mon  ventre, descend  plus bas... je devine ce qu'il veut, je cherche à l'éviter, de
même que j'ai toujours esquivé  ce contact trop intime -  mais sans effet, il  est
décidé à surmonter toutes mes réticences.
Je le  sens qui m'explore, butinant l'entrecuisse, de la  langue, des lèvres, et d'un
coup  il me mord  avec force au plus secret, m'arrachant un  nouveau cri aigu,
faisant jaillir mes larmes, et maintenant sa prise solide malgré mes tentatives pour
lui échapper.
Il tient bon jusqu'à ce que je cesse de me débattre, jusqu'à ce que je renonce et
m'abandonne à tout ce qu'il veut, sans force, domptée.
Alors seulement, il s'allonge  sur moi et se presse contre mes hanches pour me
faire sentir ce qu'il me réserve...

Comme  mues  par  une   volonté  propre,  mes  mains  partent   à  la   découverte,
explorent  son torse  à la  musculature  compacte, ses bras rivés autour de  moi
comme deux barres de fer, sa peau, d'une douceur inimaginable  par contraste,
sur la  face  interne  des bras et le long  des côtes,  la  cambrure  de  sa colonne
vertébrale, la lisière du jean blanc et la peau cachée, plus voluptueuse encore,
que j'effleure à peine sous la ceinture...
Je glisse une  main entre lui et moi pour le délivrer de son jean, qui souligne  à
quel point il est prêt... Il ne porte rien dessous et son état me trouble encore
davantage...
Mes mains en  coupe enveloppent son sexe, l'enserrent, le caressent. Il bascule
sur le  flanc et  me  laisse  le  cueillir  entre  mes  lèvres,  le  goûter,  l'avaler aussi
profond que je peux. Le sentir réagir au moindre effleurement déclenche en moi
un   désir  ardent,  impérieux,  et  me  fait trembler et  flamber  de la  racine des
cheveux  jusqu'à la plante des pieds.
Il me devine, et reprend le contrôle, à nouveau allongé sur moi, sa peau nue si
tentante, qui devient électrique au contact de la mienne.

A mon oreille il murmure:
--Je   vais   te   pénétrer  très   lentement,   pour  que   tu   me   sentes  entrer  en   toi,
centimètre par centimètre, jusqu'à ce que tu me supplies...
Sans la moindre hésitation, le moindre tâtonnement, il me prend.

Le cocktail infernal de désir, de frustration et de douleur a porté mes sens à un
tel paroxysme que je détecte même le plus infime de ses mouvements dans ma
chair, à tel point que je pourrais dessiner sur ma peau sa position exacte en moi à
chaque seconde...

Jamais je n'aurais imaginé une telle perfection, qui m'arrache de nouvelles larmes.
Il me comble, il me tourmente, il m'éblouit.
Grisée par son parfum, le velours de sa peau, la force de ses bras qui m'enserrent
à me broyer, l'ombre de barbe de son menton qui effleure la pointe sensible de
mes seins,  je m'offre  à lui comme  jamais je ne  l'aurais cru  possible, il vient en
moi, et c'est sa place, de toute éternité. 
                           
 
                                                              *****
Par paulgris - Publié dans : nouvelles érotiques - Communauté : textes érotiques
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